Nos bénévoles, nos cadres et nos élus se donnent sans compter, mais notre organisation est complexe et trop souvent les freine là où elle devrait les soutenir, les contrôle là où elle devrait les encourager et faciliter leurs actions.

J'engagerai une grande vague de simplification, pour que l'essentiel de votre temps soit consacré à l'action. Je crois aussi qu'il est temps de renforcer la confiance qui nous lie autour d'une idée simple : chacun est responsable et décline à son niveau la mise en œuvre de la stratégie commune. En contrepartie nous attendrons une exemplarité de chaque instant.

Au-delà d'améliorer votre quotidien, ce nouvel élan nous permettra d'avoir plus d'impact et d'être plus réactifs. Dans un monde traversé par les crises, il libérera nos énergies et nos capacités d'agir ensemble.

Notre ancrage territorial est une force que nous devons développer et renforcer. La Croix-Rouge française n'est pas une association comme les autres. Notre mission fondamentale nous oblige : être au contact, tisser des liens, inspirer confiance. Partout où nous avons choisi d'agir, nous devons être visibles, crédibles, attendus.

C'est une responsabilité immense. Peut-être même notre première mission : être l'emblème qui protège, l'acteur de confiance des populations et des pouvoirs publics.

Pour y parvenir, je crois qu'il faut nous ouvrir plus largement. À tous ceux qui veulent s'engager, même autrement. À tous les territoires, même les plus éloignés. Parce que la Croix-Rouge est forte lorsqu'elle appartient à tous.

La Croix-Rouge française mène aujourd'hui près de 120 activités différentes. Le siège compte 80 programmes stratégiques, sans réelle priorisation ni cohérence nationale. Cette dispersion dilue nos moyens financiers et humains, fragilise notre efficacité et génère une grande frustration sur le terrain.

La Croix-Rouge française doit concentrer ses moyens et son énergie sur l'essentiel. Les attentes ne seront pas les mêmes partout. Les moyens non plus. Mais chaque territoire doit pouvoir se sentir utile, soutenu et pleinement à sa place dans le projet collectif. L'entraide entre territoires devra être fortement encouragée.

Aujourd'hui, l'Histoire se rappelle brutalement à nous, et face à elle, nous ne sommes pas prêts. Il est urgent de mettre l'association en ordre de marche, de concentrer nos forces pour être à la hauteur des défis qui nous attendent. C'est le sens de mon engagement.

Les crises sont plus fréquentes, plus intenses, plus complexes. Face à cette réalité, la Croix-Rouge française est plus utile que jamais. Pour rester à la hauteur de son histoire et des défis d'aujourd'hui, elle doit se préparer et se renforcer davantage.

La première priorité, c'est de recréer un véritable sentiment d'appartenance chez nos volontaires. La Croix-Rouge française doit être le lieu où nos secouristes restent, liés par des missions à la hauteur de leurs engagements, et par une expérience qui donne envie de continuer : exigeante, fraternelle, motivante, différente de toutes les autres.

La seconde priorité, c'est de penser le secours comme un Tout. Prévention, intervention, relèvement : chaque étape compte et se complète. En situation de crise, les frontières tombent : le social, le secourisme, la formation s'entremêlent. Unité : ce doit être notre nouvelle façon d'agir.

Les territoires ultramarins représentent une richesse exceptionnelle par leur diversité humaine, sociale, culturelle et géographique. S'ils font face à des défis majeurs (crises climatiques, tensions sociales, pauvreté accrue, difficultés d'accès aux services essentiels ou encore isolement géographique), je suis conscient que chaque territoire présente ses propres spécificités, son histoire, sa culture, ses diversités, ses vulnérabilités particulières, sa résilience.

Le mandat qui s'achève a posé les bases d'un nouvel investissement de la Croix-Rouge française dans ces territoires. Aucun président avant Philippe Da Costa ne s'était autant investi et rendu dans les Outre-mer, démontrant, par sa présence, un engagement sans précédent que je compte bien poursuivre.

Je crois fortement que notre stratégie territoriale actuelle va dans le bon sens ! Aucune réponse unique, centralisée, nationale ne saurait être pertinente face à la diversité des situations. Je souhaite poursuivre et amplifier cette adaptation à chaque contexte, car seule une approche différenciée, co-construite avec les acteurs locaux, permet de répondre de manière juste et efficace aux besoins des populations.

Pour cela, je ferai de l'Outre-mer une priorité claire de ce mandat : nous renforcerons significativement les moyens humains et financiers à disposition de nos volontaires, ainsi que notre coopération avec les différents partenaires locaux.

Je suis convaincu que l'avenir des Outre-mer est un enjeu majeur pour notre association. Souvent à l'avant-garde, par nécessité, de l'innovation, de l'engagement et de la résilience, je suis convaincu que ces territoires peuvent inspirer nos actions et renforcer nos savoir-faire face aux crises nationales et internationales. Je veillerai à mieux valoriser et partager leurs initiatives, leurs réalisations, et à les faire résonner bien au-delà de leurs frontières.

Nous portons haut les valeurs humanistes d'entraide, de respect et de dignité. Pourtant, comme dans toute organisation, nous ne sommes pas à l'abri de comportements inacceptables. La lutte contre les violences sexistes et sexuelles (VSS) constitue donc un engagement majeur. Nous devons garantir que chaque volontaire, chaque salarié, chaque personne engagée puisse s'exprimer librement, être écoutée, protégée et soutenue.

Ces dernières années, des avancées importantes ont été faites. Il nous faut désormais poursuivre et aller encore plus loin, avec une règle claire : tolérance zéro.

Mais il ne suffit pas d'affirmer des principes : nous devons créer un climat où la parole est non seulement possible, mais encouragée et protégée. Cela suppose la mise en place de dispositifs accessibles, clairs et efficaces pour signaler toute situation inacceptable, et une réponse rapide et rigoureuse à chaque alerte.

Libérer la parole, c'est aussi former nos cadres, développer une culture de l'écoute active, de la bienveillance et de la vigilance partagée. C'est bâtir un environnement de confiance, où chacun sait qu'il sera entendu sans crainte de représailles.

Garantir un cadre d'engagement sain impose également de prévenir et résoudre les conflits internes, qui fragilisent la cohésion et peuvent générer d'autres formes de souffrance. La médiation, l'accompagnement à la communication non violente et la formation au management associatif doivent devenir des réflexes naturels dans toutes nos structures.

Chaque situation de conflit devra être identifiée et prise en charge rapidement, avant qu'elle ne dégrade la confiance et l'engagement des équipes. La médiation deviendra un réflexe immédiat :

• Des formations obligatoires à la communication non violente et à la gestion active des conflits seront proposées aux élus et aux cadres bénévoles.
• Des salariés dédiés à l'accompagnement des équipes (médiateurs, référents vie associative) seront identifiés et mobilisables dans chaque territoire pour traiter les situations sensibles.
• Un processus clair et rapide permettra de signaler une difficulté relationnelle et d'obtenir un soutien avant que la situation ne dégénère.

Prévenir et résoudre les conflits n'est pas un sujet annexe : c'est une condition indispensable pour bâtir des équipes solides, protectrices, capables d'agir efficacement et durablement au service de nos missions.

La Croix-Rouge française, le Mouvement en général, doit aujourd'hui naviguer dans un contexte international profondément instable : diminution ou instrumentalisation croissante de l'aide publique au développement, repli stratégique de certains États, concurrence accrue entre acteurs, tensions géopolitiques et recompositions d'alliances.

Face à ces mutations, la Croix-Rouge française a sans doute autant à apprendre du Mouvement qu'à y contribuer. Je crois que nous devons faire le choix de la coopération et de la résilience collective. La force du Mouvement réside dans sa capacité unique à faire système. Nous devons nous y inscrire pleinement.

Il est donc crucial de poursuivre les efforts initiés par le président Philippe Da Costa pour renforcer l'implication de l'association dans les instances du Mouvement, en tant que facilitateur neutre et médiateur technique. Dans un monde fragmenté, notre rôle sera d'autant plus utile si nous savons relier, écouter et apprendre mutuellement.

Dans cette même logique, nous devons aller plus loin dans le soutien au développement des Sociétés Nationales, en prenant le concept au mot. Avec humilité, reconnaissons que nous avons autant à apprendre de nos sociétés sœurs qu'à les soutenir. Je pense à la Croix-Rouge ukrainienne, dont la préparation et la capacité d'adaptation en contexte de guerre doivent nous inspirer, nous aussi, en France. Mais aussi à la Croix-Rouge indonésienne, dont l'expérience en préparation et gestion des catastrophes naturelles devrait nourrir nos propres pratiques.

Cette logique de "faire système" doit aussi irriguer notre action sur le territoire national. La France peut, demain, redevenir une zone de vulnérabilité. Mutualiser nos compétences, nos outils et nos savoirs est une condition de notre résilience collective, mais aussi de notre crédibilité vis-à-vis des pouvoirs publics.

Enfin, face à l'incertitude croissante, nous devons pousser plus loin la logique de plateforme, au-delà de l'intervention et de la prévention. Je propose de créer, d'une part, une plateforme de levée de fonds publics et privés dédiée au Mouvement, conçue comme un espace d'initiatives partagées. Elle permettrait de connecter les Sociétés Nationales avec des bailleurs institutionnels, mais aussi avec des acteurs hybrides ou non traditionnels (diasporas, fintechs, réseaux religieux) dans une logique d'autonomisation, de coopération et d'innovation. D'autre part, une plateforme numérique centrée sur la formation et le partage des connaissances, combinant contenus en ligne et complétée par une équipe mobile, offrirait un accès élargi au renforcement de capacités, dans une logique de circulation horizontale du savoir.

Les établissements de la Croix-Rouge française sont une composante essentielle de notre mission. Mais depuis des années, leur organisation comme leur gestion sont à bout de souffle.

Il est temps de faire aboutir une réforme attendue, réfléchie, et préparée depuis plus de dix ans : la création d'un véritable groupe Croix-Rouge française.

Avec plus de 600 structures, 16 000 salariés et 1,3 milliard d'euros de produit d'exploitation, ces établissements exigent des outils, des responsabilités, une réactivité que notre modèle actuel ne permet plus.

Ce que nous proposons, ce n'est ni une privatisation, ni une partition.
C'est une autre manière de structurer ces activités pour qu'elles soient mieux gérées, plus autonomes, et toujours profondément associatives.

Cela implique :

• De redonner une autonomie de gestion à chaque filière, avec des outils adaptés à leurs réalités spécifiques ;
• D'installer une gouvernance associative spécialisée, composée de personnes compétentes sur les enjeux médico-sociaux, éducatifs ou sanitaires ;
• De permettre des partenariats dynamiques avec d'autres structures, aujourd'hui bloqués par notre statut unique d'association d'utilité publique ;
• Et de finaliser un chantier stratégique porté depuis 2012 par le Président Jean-François Mattei et exploré par la suite par les Présidents Eledjam et Da Costa. Notre projet s'inscrit dans la continuité parfaite du discours de Président Mattei sur le sujet.

Cette transformation nous permettra de mieux concilier performance, qualité et sens.

Et surtout, elle se fera avec vous : salariés, représentants du personnel, élus bénévoles et directions concernées.

Je vous présenterai cette vision plus en détail lors d'une visio dédiée :